L'actualité de 
Barthélémy Boganda.

La situation 
politique en République centrafricaine remet le père fondateur du pays au goût 
du jour.  Elle en fait le personnage 
central de notre vécu commun, mais sans doute aussi, le porteur de notre 
espérance.
1 – L'engagement 
politique.
Barthélémy Boganda 
(B.B) naît le 4 avril 1910 à Bobangui, petit village de la Lobaye, en pays 
Ngbaka. Il est très tôt confronté aux dérives du système colonial : son 
père disparaît au cours d'une opération militaire menée par l'administration 
coloniale contre le village de Bobangui ; sa mère décède sous les coups 
portés par un milicien de la Compagnie forestière du Sangha-Oubangui (CFSO), 
société concessionnaire de la vallée de la Lobaye, parce qu’il manquait quelques 
grammes dans sa récolte quotidienne de caoutchouc.
Recueilli par le 
lieutenant Meyer, il est confié à l'orphelinat de Mbaïki, le chef-lieu de la 
région Lobaye. Nous sommes en 1920. En décembre de la même année, il est remis à 
la Mission Saint-Paul des Rapides, à Bangui, où il est baptisé le 22 décembre 
1922 sous le patronage apostolique de Saint Barthélémy. Il poursuivra ses études 
de séminariste à Brazzaville, à Maydi au Congo belge, puis au grand séminaire de 
Yaoundé, où il est ordonné diacre en 1937.
Il regagne alors 
Bangui et est ordonné prêtre le 17 mars 1937 par Mgr Marcel 
Grandin.
L'ascension humaine, 
sociale et politique de Barthélémy Boganda est donc inséparable de 
« l'évangélisation de l'Oubangui-Chari, dans le contexte de la colonisation 
française ». (1)
Deux missionnaires 
forgeront la personnalité de B.B : le RP J-R Calloc'h et Mgr 
Grandin.
Au premier, il doit 
sa volonté de devenir prêtre, « fasciné par son érudition, son dévouement 
et sa capacité à payer de sa personne dans les travaux des champs », à 
l’époque où les missions vivent en autonomie. C'est à l'exemple du révérend père 
Calloc'h que Barthélémy Boganda créera la Soucoulolé, la société coopérative de 
l'Oubangui-Lobaye-Lessé.
Au second, qui 
l'ordonna prêtre, il sera reconnaissant de l'avoir toujours soutenu dans ses 
diocèses et d'avoir poussé sa candidature comme député au second collège de 
l'Oubangui-Chari – celui des indigènes - à l'assemblée nationale française où il 
sera élu le 10 novembre 1946.
C'est donc à partir 
de 1946 que démarre véritablement la carrière politique de Barthélémy Boganda. 
Plusieurs évènements majeurs successifs  
viendront le conforter dans son engagement.
-        
En août 1947, il 
participe à la création du parti de l'Union oubanguienne, dont la direction est 
confiée à Georges Darlan, mais dont il démissionnera dès 1947. Il invoque à 
cette occasion des différences d'appréciation entre les objectifs initiaux du 
mouvement et les actions sur le terrain. En réalité, ses initiatives et 
invectives à Paris n'étaient pas relayées sur le plan 
local.
-        
La mort de Mgr 
Grandin en 1947 le prive du soutien dont il a besoin au plan personnel, d'autant 
qu'il est l'objet de dénonciations récurrentes provoquées par sa liaison avec sa 
secrétaire française. Il est suspendu de toute charge apostolique le 25 novembre 
1949 et sera révoqué un mois plus tard. Le 13 juin 1950, il épouse Melle 
Michelle Jourdain.
-        
Le 28 septembre 1949, 
il crée le mouvement d'évolution sociale de l'Afrique noire (MESAN). 
Jusqu'alors, il était député sous l'étiquette du MPR et se trouvait en butte 
avec les tenants du rassemblement démocratique africain (RDA) d'Houphouët-Boigny 
Félix ; l'Afrique de l'Ouest et l'Afrique équatoriale n'ayant pas la même 
conception de la France d'Outre-mer.
2 – Barthélémy 
Boganda et ses compagnons : des hommes de devoir.
L'action politique de 
Barthélémy Boganda connaîtra deux phases : une phase d'apprentissage et 
d'ascension (1938 – 1949), et une phase de maturité et d'approfondissement (1949 
– 1959).(2)
-        
L'ascension fut 
rapide, voire brutale.
Ordonné prêtre en 
1937, Barthélémy Boganda doit accomplir son sacerdoce successivement à Grimari, 
Bambari, Bangassou. Les exactions et humiliations faites aux indigènes, telles 
qu'il les constate et les vit sur le terrain, l'amènent très vite à s'investir 
dans l'action politique.
Au contact de la 
hiérarchie des missions catholiques en Oubangui-Chari, surtout des actions que 
celle-ci mène « dans le domaine de l'éducation, de la formation et de 
la santé », il prend conscience du rôle qui peut être le sien. Il bénéficie 
alors du soutien de la mission catholique, exprimé sans ambages par  Mgr Grandin : « il y a 
tellement de gueulards anti-français que je n'ai pas hésité à lancer l'abbé 
comme adversaire aux communistes, socialistes, SFIO, etc, qui croient que nous 
sommes des moutons muselés. Alors c'est la bagarre ! C'est la lutte … pas 
finale ».
L'empire colonial est 
alors traversé par un vent aigre d'anticléricalisme, surtout en France 
métropolitaine.
Ce soutien 
apostolique va mettre à sa disposition le réseau des catéchistes des différentes 
missions catholiques où l'abbé a séjourné. Lui-même donne de sa personne. A vélo 
ou bientôt en motocyclette, il parcourt les terres de son sacerdoce et laboure 
le terrain.
Bien plus, pour 
conquérir l'imagerie populaire, il deviendra le personnage 
« biblique » des miracles du lac de Tibériade, des Noces de Cana, etc. 
C'est ainsi que la légende voit l'abbé Boganda marcher sur les eaux de 
l'Oubangui, les pieds au sec, alors qu'il se rend à Zongo faire campagne. Bien 
entendu, son concurrent, Jean-Baptiste Songomali, comptable à la société COTONAF 
(coton d'Afrique) et trésorier de la section locale de la SFIO, « boira la 
tasse » en essayant de le suivre !
Outre le soutien de 
l'église catholique, c'est surtout la mobilisation des Oubanguiens eux-mêmes qui 
fera pencher la balance en faveur du prélat.
Depuis Dakar où il 
poursuit ses études, Abel Goumba n'hésite pas à lui apporter son appui. Le 16 
mars 1946 il écrit : « Je vous le dis, mes frères, ne lâchez pas 
l'abbé Barthélémy Boganda ou M. Indo, car nous perdrons l'Oubangui. Vous devez 
élire l'un d'eux ».
Le 26 mars 1946, 
c'est au tour de Michel Goumba, alors commis d'administration au cabinet du 
gouverneur à Bangui, de s'engager : « Je demande et recommande 
formellement à tous, de faire la propagande de l'abbé Boganda, seul autochtone 
capable de défendre sans crainte nos intérêts au sein de l'assemblée à 
Paris ». Michel est le père d'Abel.
Barthélémy Boganda 
finira par être élu, avec le soutien du MRP.
Dès son élection 
comme député du collège indigène, il se rend à Paris et prend la parole pour 
réclamer l'application de la loi votée le 11 avril 1946 qui interdit le travail 
forcé. Les résultats du référendum constitutionnel du 27 octobre 1946, lequel 
concrétise la naissance de l'Union française et fait des Africains, de l'AOF et 
de l'AEF, des citoyens français, devaient conforter cette démarche. Mais ces 
revendications sont ignorées par l'administration coloniale et ne rencontrent 
aucun écho sur place.
Ainsi commence la 
seconde phase de l'engagement politique de Barthélémy 
Boganda.
-        
La phase de maturité 
politique et d'approfondissement idéologique.
Prenant acte des 
difficultés qu'il rencontre pour faire connaître ses actions politiques et ses 
idées, Barthélémy Boganda va s'affranchir du soutien du MRP. En Août 1947, il 
crée l'Union oubanguienne, mais bien vite il est contraint de quitter ce 
mouvement.
Le 22 mai 1948, il 
lance l'initiative de la Soucoulolé qui vise à agréger les planteurs de la 
Lobaye et, subsidiairement, à lui fournir les moyens financiers de son action 
politique. En butte avec l'administration coloniale qui refuse de subventionner 
l'entreprise, Barthélémy Boganda se tourne vers d'autres modalités d'action. 
Le 10 octobre 1949, 
pour concrétiser son engagement politique, il fonde le mouvement d'évolution 
sociale en Afrique noire, MESAN. 
Parmi les adhérents 
qui se sont réunis le 28 septembre 1949 pour porter ce mouvement sur les fonts 
baptismaux, on relève les noms de : Loungoulah, Zanga, Kangalo, Michel 
Sokambi, Gaston Kambiri, Bernard Sokambi, Pierre Indo, Benoît Ndayen, Gabriel 
Gbokuka, Albert Mafutapa, Simon-Pierre Loungou.
Pour diriger le 
parti, un bureau est mis sur pied. Autour de Barthélémy Boganda, président, il 
comprendra deux vice-présidents, MM. Yabada et Mandayen, un secrétaire général, 
F. Copagon, un secrétaire adjoint Bangui-Ducasse, un trésorier général, B. 
Nzilavo et un trésorier adjoint, Charles Ondomat. 
Quelle que soit leur 
place dans la hiérarchie de l'administration coloniale, dans l'église ou les 
sociétés concessionnaires, ces hommes constitueront le fer de lance de la lutte 
pour l'émancipation et l'évolution sociale en Oubangui-Chari. 
A Berbérati, Ndélé, 
Bambari, Bouar ou Bangassou, ils relaient sur le terrain les consignes du parti 
et veillent à l'animation des sections locales.
Ce sont des hommes de 
devoir. Ils sont courageux, humbles, honnêtes, scrupuleux et … solidaires. 
Certains paieront chèrement leur engagement, l'administration coloniale 
n'hésitant pas à les sanctionner disciplinairement par des rétrogradations, des 
affectations d'office en brousse, des blâmes ou des retraits d'avantages 
divers.
 
Le voyageur, qui 
traversait les villages dans les années 1960, reconnaissait les sections les 
plus dynamiques du Mesan au fait que la population le saluait en levant l'index 
de la main droite vers le ciel, désignant l'étoile imaginaire (Tongolo), symbole 
de l'élévation morale du peuple, au plan individuel et au plan collectif. Ce 
symbole sera un marqueur qui durera bien après l'indépendance 
conquise !Tout comme sera durablement conservé dans la mémoire collective 
le mot d'ordre du parti, «  Zo kwè Zo », signifiant qu'il ne pouvait y 
avoir de différence entre les hommes fondée sur les origines, la couleur de la 
peau, la religion, les ethnies, etc.
 Enfin, faut-il rappeler que ces hommes de 
devoir ont assis la notoriété de la langue sango sur toute l'étendue du 
territoire et même au delà, au Tchad, au Cameroun et au Gabon, tout 
particulièrement. Dans ce dernier pays, le « ngbako », l'alcool de 
manioc, est baptisé « Boganda », en souvenir de la motion défendue par 
Barthélémy Boganda contre l'arrêté de l'administration coloniale interdisant la 
vente libre des alcools indigènes au profit des vins et spiritieux importés 
d'Europe.
Le 3 avril 1951, 
toujours pour concrétiser son engagement politique et élargir la base de son 
mouvement, Barthélémy Boganda lance une publication, Terre Africaine, un 
magazine d'imprimerie destiné à vulgariser ses prises de position et les 
activités du MESAN.
Lorsque le 31 janvier 
1956, le chef du gouvernement de la quatrième République, M. Guy Mollet, décide 
de confier l'autonomie aux territoires d'outre-mer afin que ceux-ci gèrent 
« démocratiquement leurs propres affaires », le Mesan est 
prêt.
 
La loi-cadre du 23 
juin 1956, dite loi-cadre Deferre, vient concrétiser cette volonté en instituant 
un collège unique et le suffrage universel direct dans tous les territoires. 
Barthélémy Boganda 
est élu maire de la ville de Bangui en novembre 1956.
Cette loi crée 
également un Conseil de gouvernement, présidé par le gouverneur mais assisté 
d'un vice-président africain, le leader de la majorité parlementaire. Ce dernier 
sera le personnage central de l'exécutif.
Les élections sont 
organisées en novembre 1957. Barthélémy Boganda est élu président du Grand 
Conseil de l'AEF, pendant qu'en Oubangui-Chari, le Conseil de gouvernement est 
dirigé par Abel Goumba.
Boganda et le Mesan 
se mobilisent en faveur de la création d'un grand ensemble, les Etats-Unis 
d'Afrique latine, regroupant les 9 territoires français, belges et portuguais 
d'Afrique centrale. Mais ce projet est rejeté par les autres leaders africains 
concernés.
Barthélémy Boganda 
est donc contraint de renoncer et, dans le cadre du référendum de 1958 et les 
perspectives d'indépendance qu'il suggère, propose le nom de République 
centrafricaine pour le seul territoire de l'Oubangui-Chari, le 1er décembre 
1958.
Le 29 mars 1959, 
Barthélémy Boganda trouva la mort dans un accident 
d'avion.
L'indépendance 
surviendra le 13 août 1960 et la République centrafricaine lui survivra. Elle 
survivra à son fondateur parce que les hommes de devoir qui ont accompagné 
Barthélémy Boganda dans son combat, ses compagnons, prendront la relève. Devenus 
sous-préfets, préfets, directeurs d'administration centrale dans les différents 
ministères ou à la tête des établissements publics, ils mettront en œuvre les 
paradigmes qui ont présidé à la naissance de la RCA :  
-        
l'égalité du 
traitement de tous devant la loi, fondement du principe de l'unité du 
pays,
-        
le travail dans le 
souci de l'intérêt général, fondement de la richesse de la 
nation,
-        
la dignité du 
comportement, ne pas reclamer pour soi les honneurs et les récompenses que l'on 
ne mérite pas.
Ils auront contribué 
à l'épanouissement de la nation centrafricaine, à sa prospérité et à son unité 
jusqu'au coup d'Etat du 1er janvier 1966.
3 – Les idées et le 
combat de Barthélémy Boganda sont toujours d'actualité.
Dans sa déclaration 
de foi pour les élections à l'assemblée nationale de 1946, Barthélémy Boganga 
pointe 15 priorités. Il ne faut pas hésiter au bonheur de les publier 
intégralement :
-        
une juste répartition 
des populations oubanguiennes dans les assemblées ;
-        
l'extension de 
l'exercice du droit citoyen ;
-        
l'accès à 
l'administration du pays et aux fonctions publiques ;
-        
la création de cités 
indigènes ;
-        
la création de cités 
pour les employés ;
-        
le respect de la 
personne humaine dans la rémunération du travail ;
-        
la multiplication des 
écoles primaires, secondaires, supérieures et 
professionnelles ;
-        
liberté de 
l'enseignement ;
-        
la multiplication 
d'hôpitaux mieux aménagés ;
-        
l'assainissement des 
villes et des villages ;
-        
l'emploi des moyens 
mécaniques pour la construction et l'entretien des 
routes ;
-        
le développement du 
machinisme permettant de décupler la production 
agricole ;
-        
l'accession gratuite 
à la propriété ;
-        
l'utilisation de nos 
ressources au profit du pays ;
-        
le contrôle serré du 
commerce empêchant les profiteurs de nous exploiter.
Soixante-dix ans plus 
tard, le pays est loin du compte. On peut aujourd'hui reprendre intégralement 
cette liste telle quelle. Qu'il s'agisse de la mécanisation de l'agriculture, de 
la modernisation des infrastructures, du contrôle du commerce ou l'affectation 
des richesses nationales tirées de l'exploitation de nos ressources naturelles 
au bénéfice de l'intérêt général, aucun de ces objectifs n'a été atteint ! 
Pire, concernant l'assainissement des villes et des villages par exemple, 
l'incurie est telle que les cimetières de naguère sont laissés à l'abandon et 
envahis par la nature, obligeant parents et alliés à enterrer leurs morts au gré 
de leur concession ou au bord des routes. Le respect dû aux morts dont se 
gargarisent tous les Africains est ici foulé au pied. Il paraît même qu'à Nola, 
dans l'ouest du pays, « le trafic des ossements humains s'est substitué à 
celui du diamant » !
On ne peut donc tenir 
Barthélémy Boganda responsable de ces insuffisances pour dédouaner ses 
successeurs. L'intéressé lui-même avait répondu par avance à ces critiques. Dans 
une lettre adressée le 3 mars 1947 à Abel Goumba, il pointait du doigt la 
responsabilité du chef indigène :
« Certaines 
erreurs de nos chefs actuels viennent de ce qu'ils n'ont pas été préparés à 
leurs responsabilités. Il est d'absolue nécessité qu'ils reçoivent une solide 
instruction. Cette instruction, nos futurs chefs ne pourront vraiment la trouver 
que dans nos écoles. La culture européenne ne saurait, seule, répondre à leurs 
besoins. Ce qui leur faut, c'est une culture et une formation 
africaine ».
Le professeur 
américain Samuel Paul Huntington ne dit pas autre chose dans le « Choc des 
civilisations », lorsqu'il énonce que les universités européennes forment 
les élites africaines, non pour servir l'Afrique, mais pour servir les intérêts 
de l'Occident.
Cependant, promouvoir 
la culture africaine ne veut point dire recourir aux coutumes indigènes ! 
Là encore, Barthélémy Boganda fait œuvre de pédagogie. A un administrateur 
colonial qui lui reprochait de régler les palabres sans tenir compte des 
coutumes indigènes, il répond   
:
« Coutumes 
indigènes signifient religion car tout ce qui fait l'indigène est acte de 
religion, et sa religion est le fétichisme ; coutumes indigènes, c'est 
l'anthropophagie ; coutumes indigènes, c'est l'esclavage ; coutumes 
indigènes, c'est le mariage forcé qui est une transformation très récente de 
l'ancien esclavage... car le mariage forcé et la polygamie sont, dans leurs 
effets, plus nuisibles que l'anthropophagie elle-même ». Sic 
transit !
... Barthélémy 
Boganda aura inspiré Ngountidé.
A la lueur de cette 
déclaration, tout un pan de la nouvelle constitution de la République 
centrafricaine, adoptée le 30 mars 2016, devrait être réécrit, comme nous 
l'avions suggéré dans des écrits précédents, faisant suite aux consultations 
populaires à la base et au forum intercentrafricain de Bangui. 
(3)
Il n'en demeure pas 
moins que s'il y a encore de jeunes Centrafricains qui s'interrogent, 
critiquent, vitupèrent le père fondateur de la République centrafricaine, ces 
prises de position laissent supposer, que le travail de mémoire n'a pas été 
effectué, que les historiens centrafricains n'ont pas fait œuvre utile, que les 
successeurs politiques de Barthélémy Boganda ont été évanescents. De fait, le 
Mesan n'est plus un grand mouvement de masse. C'est devenu un petit nid de 
passereaux.
N'étant pas 
historien, je ne puis prétendre avoir fait œuvre scientifique ci-dessus. N'étant 
pas le contemporain de Barthélémy Boganda, je ne puis témoigner. En simple 
citoyen, je livre ici un commentaire de bon sens, c'est-à-dire un jugement 
subjectif.
Néanmoins, critiquer 
la personnalité et l'action politique de Barthélémy Boganda à partir d'un 
article du magazine américain New-York Times, publié le 30 mars 1959, au 
lendemain de la mort du père fondateur de la RCA, me semble inadmissible. A 
l'époque de cette publication, les Etats-Unis étaient un pays ségrégationniste 
et raciste où le Ku Klux Klan lynchait encore les Noirs au nom d'une prétendue 
supériorité de la race blanche. Qu'un journal conservateur puisse comparer 
Barthélémy Boganda a un suppôt du communisme n'a rien d'étonnant. C'était 
l'époque du Mc Carthysme.
Il est cependant 
scandaleux qu'on se saisisse aujourd'hui de cet article pour jeter l'anathème 
sur le combat d'un homme qui, à mon sens, est l'égal d'un Martin Luther King, 
toute chose étant égale par ailleurs.
Paris, le 30 
septembre 2016
Prosper 
INDO
Président du 
CNR
(1)   Célestin DOYARI DONGOMBE : 
« L'Oubangui-Chari et son évangélisation, dans le contexte de la politique 
coloniale française en Afrique centrale (1889-1960) », L'Harmattan Italia 
2012.
(2)   Jean-Dominique PENEL : 
« Barthélémy Boganda, Ecrits et Discours. 1946-1951 : La lutte 
décisive », L'Harmattan, 1995.
(3)   Prosper INDO : « De 
l'organisation de l'Etat et de sa Constitution », Paris, 6 novembre 
2015