Jacques Chirac : « Le temps de
l’impunité est terminé »
La Voix du Nord
(Edition du Vendredi 21 Février 2003)
JACQUES CHIRAC a jeté hier, à l’ouverture du
22e sommet France-Afrique, les bases d’un nouveau partenariat entre Paris et le
continent noir afin de sortir les Africains des « maux endémiques » du
sous-développement.
Dans une mise en garde à peine voilée au président ivoirien Laurent Gbagbo, le
président français a averti que le « temps de l’impunité était terminé »
pour les dirigeants africains qui se rendraient coupables de violences. Finis
l’époque post-coloniale et les réseaux parallèles de la « Françafrique ».
« Le temps est désormais aux responsabilités partagées », a lancé Jacques
Chirac devant les représentants de 52 pays, dont 37 chefs d’Etat, réunis au
Palais des congrès pour la séance d’ouverture du sommet.
« Communauté de destin »
Insistant sur sa « foi en l’Afrique », Jacques Chirac a salué «
l’engagement des dirigeants africains » en faveur des principes
démocratiques à travers le Nouveau Partenariat pour le développement économique
de l’Afrique (NEPAD). Rappelant que le développement de l’Afrique était un des
thèmes majeurs du prochain sommet du G8 à Evian, il a souhaité que la rencontre
de Paris permette de « dresser les priorités immédiates du NEPAD », «
à commencer par les secteurs clés » du développement social, de l’accès à
l’eau et de l’agriculture.
Réaffirmant la « communauté de destin » entre l’Afrique et la France,
Jacques Chirac a assuré au passage que le continent noir était « au coeur des
priorités de la France ». Sur le plan financier, il a promis que l’Afrique
recevrait « plus de la moitié des nouveaux flux » créés par
l’augmentation programmée de l’aide publique au développement française.
Le président français a cependant averti que les nombreuses crises survenues ces
dernières années, du Congo à la Côte d’Ivoire en passant par la Centrafrique, «
nuisaient à l’Afrique tout entière ». L’avertissement du président
français visait notamment Laurent Gbagbo, grand absent du sommet. Un rapport des
Nations unies accuse les proches du président ivoirien d’être liés aux «
escadrons de la mort » qui se sont rendus coupables d’exactions contre les
populations civiles. « Les chefs d’Etat qui se rendraient coupables de
violences ont désormais à craindre d’être sanctionnés par la Cour pénale
internationale (CPI) qui étend sa protection à tous les citoyens du monde
», a rappelé Jacques Chirac.
Indigné par ces propos, le porte-parole de Laurent Gbagbo a accusé Jacques
Chirac « d’agiter le chiffon rouge » pour « faire pression » sur
le président ivoirien, qui refuse toujours l’entrée des rebelles dans le
gouvernement d’union nationale prévu par l’accord de Marcoussis. «
Instrumentaliser le droit international pour le faire céder, c’est indigne,
a estimé Toussaint Alain.
Je ne pense pas que la CPI ait été créée pour renverser les gouvernements.
»
Déclaration sur l’Irak
Le message de Jacques Chirac s’adressait également au président
zimbabwéen Robert Mugabe, qui est lui bien présent à Paris en dépit des graves
violations des droits de l’homme dans son pays..
Après le discours du président français, le secrétaire général des Nations
unies, Kofi Annan, a axé son intervention sur un autre fléau, le sida. Le
secrétaire général a annoncé la création d’une « commission de haut niveau
» pour formuler des recommandations en vue de mettre fin à « la crise de
gouvernance » entraînée par la pandémie, qui décime les élites africaines.
A l’issue de cette séance d’ouverture, les participants ont poursuivi leurs
discussions à huis clos. Dans l’après-midi, ils ont adopté une déclaration sur
l’Irak qui affirme, en conformité avec la position française, que la guerre «
ne saurait constituer qu’un ultime recours ». Le sommet se terminera ce midi
par une conférence de presse.