Pourquoi les Artistes Centrafricains souhaitent la Séparation de la Culture des Sports.
Les activités des Artistes Centrafricains sont reléguées au second plan et l'existence même du Ministère dénommé Jeunesse, Sports Arts et Culture est fourre-tout qui ne veut rien dire. Aussi, conformément aux recommandations du Dialogue National, le Département de la Jeunesse, Sports doit être séparé de celui des Arts et de la Culture. Dans cette dénomination trompeuse, la Culture ne s'affirme pas et le Sport qui est un élément factuel du fait de mesurer des résultats des compétitions de Basket et du Football par exemple domine le secteur Culturel.
Dans un pays où la Culture se définit souvent comme un Folklore ou comme une Animation Festive menée par des groupes locaux, l'on comprend alors pourquoi cette confusion se traduit au niveau même de la Représentativité de ce Domaine. Et pourtant, la Culture est non seulement toutes les Manifestations Culturelles et Artistiques qui caractérisent notre Héritage Ancestral, notre Manière de faire, d'Agir, mais aussi notre bonne Image à l'extérieur.
En général, la Culture d'un pays implique la Musique, la Danse, la Peinture, la Sculpture, l'Architecture, le Théâtre et le Cinéma. Pour nous qui sommes Centrafricains, nous rajouterons à cette liste le domaine des Pygmées et notre langue Nationale et Officielle le Sango. Tout d'abord, nous avons cette chance de cohabiter avec des Pygmées qui possèdent l'une des plus vieilles Civilisations mondiales avec des connaissances et savoirs inégalés.
A titre d'exemple, la Polyphonie des Pygmées fondée sur des rythmes syncopés et de techniques de contre voix est une richesse unique Planétaire dont le pays ne tire pas profit. Ce n'est pas le fait du hasard si la plus part des chercheurs mondiaux s'intéressent à cette population Centrafricaine, notamment les Pygmées Aka dont la musique est classée depuis 2003 par l'UNESCO comme Patrimoine Mondial de l'Humanité. Aussi, il importe de rappeler que les Pygmées constituent de nos jours, l'une des populations en voie de disparition et dont la Culture est en danger. D'où l'importance de prendre en compte cet aspect de notre Culture encore mal organisé en vue de le Protéger et de le Promouvoir.
Pourquoi la langue Sango doit faire partie d'un Département de la Culture Centrafricaine. Tout d'abord, la langue Sango à l'origine parlée par l'ethnie Sango s'est imposé sur tout le Territoire Centrafricain et voire même au-delà de nos frontières. De nos jours, le Sango devenu la langue Nationale et Officielle de la République Centrafricaine a besoin d'être revalorisée. Normalement le Sango devait être enseigné dans nos Ecoles et dans nos Instituts. Malheureusement, cet héritage Culturel qui est un fait rarissime en Afrique ne s'apprend que dans la famille et dans la rue. Le Sango est la seule langue Africaine comprise et parlée de tous en Centrafrique. Contrairement à nos cousins Congolais de la RdC qui apprennent le Lingala à l'Ecole et correspondent à leurs parents dans cette langue Nationale et Officielle, nous continuons à écrire à nos tantes et oncles souvent analphabètes en Français. Après tout, l'on se dit qu'ils doivent se faire Aider dans la traduction par des petits cousins scolarisés en français.
Ainsi, la prise en compte du Sango comme Patrimoine National Culturel permettra par exemple de Développer autour de cette langue Evolutive, un travail d'Oralité axé sur des Ateliers de Contes, Chants et d'Ecriture en Centrafrique et aussi à l'extérieur. Pour des anciens qui se souviennent encore de l'Emission " Tongana Photo a Sala Tènè" développée à l'époque et animée à la Radio Bangui par Samy Mackfoy et Martin Magnan et ayant pour but l'enseignement de la langue Sango à travers des Images était une Révolution de Pédagogie Active abandonnée depuis. Selon Samy Mackfoy, cette Méthode Pédagogique d'Apprentissage de langue Nationale inventée par des Centrafricains, est reprise depuis par d'autres pays Africains.
Ainsi, la séparation des deux Départements permettra à chaque Ministre en charge de son Secteur de le structurer et d'Elaborer un Projet de Fonctionnement de Service avec des Priorités définies. Pour la Culture, il y a Quatre vastes chantiers qui attendent notre Futur Ministre de ce Département, si Séparation il y a.
Tout d'abord, il procédera à la restructuration des Sous-Départements et à la Redéfinition de leurs Missions concrètes. Elles font Quoi ? Où ? Comment ? Avec Quels Moyens ? Et comment Mesurer les Actions qui ont lieu ? En second lieu, il organisera un Forum Culturel nécessaire à la Redéfinition de notre Politique Culturelle des dix années à venir. En troisième lieu, il procédera à la Refonte de BUCADA ( Bureau Centrafricain des Droits d'Auteur ) presque inexistant et qui permettra aux ayant droits de toucher leurs Droits d'Auteur. Enfin, il aidera à la création d'une Mutuelle des Artistes, une démarche pouvant permettre à ces derniers d'accéder à un Statut Reconnu et afin de leur éviter de vivre dans une Pauvreté Totale et de Mendicité.
Ce faisant, notre Culture sortira de son " Ghetto ", Rayonnera sur le plan Mondial et facilitera à la Découverte de notre cher et beau Pays la République Centrafricaine. Enfin, conformément aux recommandations du Dialogue National et aux voeux des Artistes qui souhaitent la Séparation des deux Ministères, et ce dans un souci d'efficacité dans les actions à mener, l'on espère tous que le Président de la République Démocratiquement élu récemment et son nouveau Premier Ministre mettent en application cette volonté populaire.
Sultan Zembellat [Paris, le 29/06/2005]
NDLR : Sultan Zembellat, musicien, animateur socio-culturel, dirige en France lassociation des artistes " APMA/Maïgaro" et le site Internet consacré à la Musique Centrafricaine : http://www.maziki.net / Contact : maziki@free.fr
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