Coupe des confédérations: les réactions des coéquipiers de Foé

LYON (Reuters), 27 juin 2003 15:36  - "Les gamins, même s'il faut mourir sur le terrain, il faut gagner cette demi-finale" : ce furent les derniers mots de Marc-Vivien Foé à ses coéquipiers, à la mi-temps du match Cameroun-Colombie, alors que le milieu de terrain devait décéder une heure et demie plus tard.

Son coéquipier Rigobert Song, qui a rapporté ces paroles à la presse vendredi matin, au lendemain du drame, était encore hébété.

"C'est terrible ce qui se passe. Je n'ai jamais vécu cela. Et pourquoi c'est Marco qui nous lâche comme cela à cet instant. Pour nous, c'est dur. Nous sommes dépassés. Nous n'arrivons même pas à nous rendre compte ce qui qui nous arrive. Marco n'était pas malade. Comment cela peut arriver ?", a-t-il déclaré en larmes.

"Surtout pour moi. Nous avons commencé en cadets ensemble, c'est un voisin de mon quartier à Yaoundé (gros sanglots)... Il est parti. On a partagé tellement de choses, quand nous sommes arrivés en Europe ensemble.

"Pour moi, c'était comme un frère. Nous avons grandi ensemble. Nous étions les anciens et je me retrouve tout seul. C'est difficile. Je pense qu'on va pouvoir se remettre mais cela va être difficile."

Rigobert Song, malgré l'émotion, a réaffirmé la volonté de l'équipe du Cameroun de disputer dimanche la finale de la Coupe des Confédérations face à la France, détentrice du trophée, au stade de France.

"LUI RENDRE HOMMAGE"

"Au stade où nous en sommes, il y a un programme à respecter. On va faire la compétition jusqu'au bout. Il faut lui rendre hommage. C'est quelqu'un qui avait beaucoupe de coeur. Hier encore, à la mi-temps, ses derniers mots, c'était : 'les gamins, même s'il faut mourir sur le terrain, il faut gagner cette demi-finale'.

"C'est lui-même qui est la victime. C'est terrible."

Et Rigobert Song de promettre une fête du football.

"On va se remettre, on va essayer de gagner, pour que ce soit un signe, vraiment à l'hommage de Marco. Cela s'imposait-il de jouer ? Honnêtement, on nous a réunis cette nuit, on a demandé si c'était possible de renvoyer la finale. Mais il y a un programme et on ne peut plus faire machine arrière", a raconté Song.

"Vu la réaction de l'équipe de France (qui a dédié son premier but à Foé, lors de sa victoire 3-2 sur la Turquie), je pense qu'il est préférable de jouer, car tous ensemble, on fera la fête du football. La finale doit être la fête pour Marco, notre copain qui nous a laissés."

"Même l'entraîneur de l'équipe de France (Jacques Santini) l'a exprimé. Ensuite, nous ramènerons le corps au Cameroun et ensuite, là-bas, c'est nous les joueurs qui allons l'enterrer."

Idriss Kameni, le gardien des Lions Indomptables, estime lui avoir perdu un "grand frère", dont les conseils vont lui manquer.

"C'était mon grand frère et sans cesse, il me disait 'si tu as un problème dans ta tête, n'hésite pas'. Et hier, je n'ai pas pu, comme d'habitude, lui demander comment il avait trouvé mon match... Car je le faisais à chaque fois. Mais là, il était couché, immobile", a expliqué Kameni, lui aussi très ému.

"COURROIE DE TRANSMISSION"

"C'est terrible, c'était la courroie de transmission entre les générations, le maître à jouer de l'équipe. Entre nous, nous avions décidé de ne pas jouer, mais après on s'est dit que la vie doit continuer.

"On ne peut pas s'arrêter là, sinon, on ne jouera plus au football. Nous devons faire cela pour lui. Nous étions très proches, ce n'était pas des relations de footballeurs, mais fraternelles."

"C'est un vide qui ne pourra pas se combler. Il a toujours été là pour mieux nous intégrer. Il disait toujours : 'ma porte est toujours ouverte'. Quand il a dit "mourrir" à la mi-temps, il disait de tout donner.

"Et là, il y a la mort réelle. Il a tout donné pour le pays, pour la qualification. Quelle valeur le trophée ? Si le seigneur nous accorde cette victoire, ce sera merveilleux pour Marco. Si on gagne, on la lui dédiera."

Figure emblématique de l'équipe du Cameroun, double championne d'Afrique et championne olympique, Roger Milla - aujourd'hui membre du staff technique - a lui aussi rendu hommage à son compatriote.

"L'équipe a décidé de jouer pour l'hommage. Nous l'avons décidé à 2h00 du matin. C'est très dur pour les Camerounais, mais lui aurait aimé disputer cette finale. On va le faire pour lui", a-t-il dit.

"Quelle valeur cela peut-il avoir ? Aucune, vraiment aucune. Aucune valeur. Mais il faut terminer la compétition pour lui."


Marc-Vivien Foé évacué du stade Gerland, jeudi

Le brutal accident de santé, de nature encore indéterminée, qui a provoqué la mort de Marc Vivien Foé n'empêchera pas son équipe de disputer dimanche à Paris la finale de la Coupe des Confédérations de football contre la France.
• Philippe Desmazes (AFP - vendredi 27 juin 2003, 15h17)

 

Marc-Vivien Foé: l'autopsie n'a révélé "aucun élément déterminant"

PhotoPARIS (AFP), vendredi 27 juin 2003, 15h17 - L'autopsie effectuée vendredi matin à Lyon sur le corps du joueur camerounais Marc Vivien Foé, 28 ans,n'a révélé "aucun élément déterminant sur l'origine de la mort", a déclaré le procureur de la République Xavier Richaud.

"C'est cardiaque sûrement, mais on a fait faire des examens complémentaires d'anatomie-pathologie et toxicologiques pour confirmer. Mais on ne peut pas tirer de conclusions", a ajouté le procureur.

PhotoUn peu plus tôt, Jean-Marcel Ferret, le médecin de l'équipe de France de football, avait estimé pour sa part que ce malaise était a priori "d'origine plus neurologique que cardio-vasculaire". "Une autopsie était en cours ce matin, et on devrait en savoir plus demain (samedi)", a déclaré le docteur Ferret, qui se trouvait au Centre technique national de Clairefontaine-en-Yvelines avec les Bleus et qui est aussi membre de l'encadrement médical de l'Olympique lyonnais, l'ancien club de Foé. "A priori, il a fait un coma de type neurologique", a-t-il ajouté, évoquant comme il l'avait fait, jeudi soir, l'hypothèse d'un accident du type rupture d'anévrisme.

"Quand l'équipe (du Cameroun) est entrée sur le terrain, le joueur avait un bon pouls et une bonne tension. A priori, le malaise n'était pas cardio-vasculaire", a poursuivi le docteur Ferret, précisant que le joueur avait "fait un arrêt cardiaque à l'entrée du cabinet médical" du stade de Gerland.

Le docteur Ferret a également affirmé que la polémique naissante sur la prétendue lenteur des équipes de secours était "une fausse polémique": "Il est vrai que les équipes médicales auraient pu entrer (sur le terrain) avant, mais la polémique ne tient pas car en cas de coma de type neurologique, il n'y a rien d'autre à faire que surveiller le pouls, la tension et la ventilation". "A ma connaissance, Marc-Vivien Foé n'avait pas de souci particulier", a ajouté le médecin.

Les dirigeants camerounais ont confirmé vendredi qu'ils n'envisageaient pas de forfait et Roger Milla, ex-joueur emblématique du Cameroun, a expliqué que le match se jouerait "à la mémoire de Marc-Vivien Foé". "Nous avons eu jeudi soir une réunion entre tous les joueurs et les dirigeants. Nous avons décidé de jouer à sa mémoire. Nous sommes tous très mal. C'était notre petit frère. Pour nous, c'est très dur. Il nous manque énormément", a-t-il indiqué. Le président Blatter a rendu visite dans la matinée à l'équipe camerounaise avant d'aller saluer à Lyon la veuve de Marc-Vivien Foé.

Le corps du joueur, décédé dans le bloc médical du stade de Lyon, a été transféré à l'institut médico-légal de la ville dans l'attente de l'autopsie. Le précédent le plus comparable remonte au Tour de France cycliste 1967 avec la mort, dans l'escalade du Mont-Ventoux, du coureur britannique Tom Simpson suite à un arrêt cardiaque. Sous l'effet de produits dopants, il était allé au-delà de ses capacités de résistance. En 1980, un footballeur professionnel français, Omar Sahnoun, avait été terrassé par une crise cardiaque à Bordeaux en plein entraînement.

Parmi les causes évoquées à chaud pour tenter d'expliquer la mort de Foé, certains ont accusé les "cadences infernales" imposées aux joueurs professionnels: compétitions multiples, saisons interminables, manque de temps de récupération entre les matches.

L'argument ne semble pas tenir concernant Foé. Lors de la saison 2002/2003 et avant cette Coupe des Confédérations, il a disputé, outre quelques matches amicaux en sélection camerounaise, 38 rencontres avec son équipe, le club anglais de Manchester City.

Un régime raisonnable si on le compare à celui auquel a été soumis le joueur le plus utilisé en Angleterre pendant la même période, le Finlandais Sami Hyypia (Liverpool): 56 matches, toutes compétition confondues. A titre de comparaison, l'un des Français les plus sollicités, Thierry Henry (Arsenal) en a disputé 52 depuis août 2002.

 

Marc-Vivien Foé en février 2002 au Mali

Le corps du joueur, décédé dans le bloc médical du stade de Lyon, a été transféré à l'institut médico-légal de la ville dans l'attente de l'autopsie.
• Issouf Sanogo (AFP - vendredi 27 juin 2003, 15h17)


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