Testament et
Inhumation de Bernardin Cardinal Gantin
Bernardin Cardinal Gantin, l’arbre
de fer (de son nom : GAN, fer et TIN, arbre) a été conduit hier dans sa dernière
demeure. Tout le peuple béninois, toute l’église universelle ont rendu un
hommage historique à celui qui aurait pu être le premier Pape noir. 42 Evêques,
7 Cardinaux, autorités politico administratives, et autres ont témoigné à
l’unanimité, de l’humilité et de l’humanité de l’illustre disparu. En rejoignant
l’immortalité, le patriarche laisse ses racines à jamais incrustées dans sa
terre africaine.
Mercredi 21 mai, le Bénin s’apprête
à accueillir la dépouille mortelle de son illustre fils Bernardin Cardinal
Gantin. Déjà à 17 heures, une foule immense formant en deux haies se remarque le
long de la voie de l’aéroport. La sécurité s’est renforcée le long de cette voie
et à l’intérieur de l’aéroport. Tout grouille. Des cardinaux, évêques,
prêtres... venus du Togo, de
Hommage de Boni Yayi à
l’illustre disparu
C’est accompagné de son épouse que
le président de
Les évêques béninois veillent et
prient pour le cardinal
Tous les évêques ont tenu à rendre,
chacun et à sa manière, un hommage mérité au cardinal. Ils ont organisé une
veillée de prière dans la nuit du mercredi au jeudi matin à 7 heures 30. Ainsi,
les Messeigneurs (Mgr) Nkoue, Feliho, Adjou, Agbanou, Ehouzou, Assogba,
Agbatchi, Houdékon, Mensah, tous évêque béninois ont veillé en se recueillant,
en priant et en chantant avec la chorale, autour de la dépouille du cardinal. Au
cours de cette veillée, ils ont été accompagnés par les sœurs de Saint Augustin.
Aux environs de 6 heures 30, à l’issue de la messe célébrée par les Mgr
Agbatchi, Houdékon et Mensah, Mgr Agbatchi a procédé à la fermeture du cercueil.
Le corps est alors recouvert du drapeau béninois pour rejoindre le stade de
l’amitié pour un hommage national.
Ouidah accueille la dépouille du
Cardinal
Après les hommages officiels rendus
au stade de l’amitié de Kouhounou, le cap a été mis sur Ouidah où le Cardinal
Bernardin Gantin sera inhumé. Cette ville historique a accueilli l’illustre
disparu avec tous les honneurs qu’il mérite. Le long de la voie inter-Etat
Cotonou Lomé, une foule immense formée en haie salue la dépouille du Cardinal. A
l’apparition du cortège à Ouidah, « une pluie d’ovations » et des animations
l’ont accompagné jusqu’à
L’étape de Notre Dame de Cotonou
Aux environs de 19 heures, l’église
Notre Dame de Cotonou est déjà presque pleine. Les populations avaient pris
d’assaut ce lieu de prière. Personne ne voulait se faire conter cet événement
inédit. Devant l’église, les jeunes s’adonnent à diverses activités génératrices
de revenus. Ils vendent des objets pieux et surtout les images du cardinal. Dans
l’attente de l’arrivée de la dépouille, la chorale inonde la cour de l’église de
chants, pieux et accueille les autorités politiques et administratives. 20h30,
les fanfares de la police nationale annoncent l’arrivée du cortège. Monseigneur
Agboton, archevêque de Cotonou, est devant l’église pour accueillir la dépouille
mortelle. A l’entrée du corbillard, accompagné par le père Jonas de la paroisse
Saint Michel, certains fidèles se mirent à applaudir et à chanter avec comme
slogan « Bienvenu cardinal », tandis que d’autres, comme un seul homme, se
mirent à genoux pour saluer l’arrivée du cardinal. Rappelons que la paroisse
Notre Dame de Cotonou est la première église du Bénin.
L’église Saint Michel de Cotonou à
l’honneur
Après Notre Dame, la dépouille du
cardinal Bernardin Gantin a été transportée à l’église Saint Michel pour la
messe d’ouverture de la veillée. La paroisse Saint Michel de Cotonou qui est la
plus grande du Bénin est devenue trop étroite pour contenir les fidèles venus de
divers horizons pour accompagner le cardinal. Des écrans géants ont été
implantés un peu partout dans la cour pour permettre, à ceux qui sont au dehors,
de vivre la célébration. A 21h49, le corps arrive enfin dans l’église où il est
accueilli par des ovations des fidèles ; des foulards blancs sont balancés pour
saluer ce grand homme. Le cercueil est déposé au milieu de la paroisse sous les
yeux protecteurs de la vierge Marie pour la célébration de la messe.
L’aéroport international de
Cadjehoun devient « Aéroport international Bernardin Cardinal Gantin de
Cadjehoun »
Le gouvernement du Bénin vient de
prendre une décision salutaire pour immortaliser l’un des derniers cardinaux
créés par Paul VI. Le président de
Oraison funèbre de Boni Yayi
« Vous voici au terme du déroulement
du destin commun aux hommes, c’est-à-dire naître, vivre et mourir. Certes, les
hommes sont mortels, cependant il y a des mortels qui ne meurent pas. Eminence,
vous devinez toute l’émotion menée de peine que j’éprouve ce jour, jeudi 22 mai
2008 en m’adressant à vous au nom de toute la nation et de toute l’Afrique pour
vous rendre un hommage à la mesure de ce que vous avez été. Figure
exceptionnelle, vous avez marqué pendant plus d’un demi siècle l’histoire de
notre cher pays, le Bénin, l’histoire de l’Afrique et l’histoire de l’église
universelle. Je me souviens en même temps que d’autres ici rassemblés de votre
parcours exceptionnel sur cette terre. Normé professeur du séminaire au
lendemain de votre ordination, vous avez été successivement durant votre riche
et brillante carrière, évêque à 35 ans, premier archevêque de l’Afrique de
l’Ouest francophone, responsable de dicastère, cardinal légal du Pape à mainte
occasion, cardinal préfet de la congrégation des évêques, doyen du prestigieux
collège des cardinaux. Ce parcours exceptionnel qui fait de vous un grand homme
de foi et de l’église catholique allait de pair avec votre souci de demeurer
constamment attacher à votre patrie, le Bénin, l’Afrique et au monde. En
annonçant votre voyage ultime vers la maison du père à partie de l’étranger,
vous avez certainement dire : « au revoir » à ce monde que vous avez servi en un
jour, en un lieu, en un geste qui rassemble ; des témoignages les plus éloquents
et les plus significatifs en un sorte de règne de trois unités dont vous avez
assimilé et enseigné la belle architecture durant toute votre existence. En si
grand homme de foi, vous avez été tout en restant proche du peuple et en
particulier des humbles, des pauvres et des sans voix. En témoigne votre
légendaire sollicitude en vers les tofins symbolisé ici à Cotonou par le centre
d’accueil et d’action sociale Monseigneur Louis Parisot. Si aujourd’hui nous
sommes fier du Sanctuaire marial de Dassa-Zoumé, la grotte d’Arigbo, nous devons
vous remercier de toute l’attention que vous avez portée à l’édification, à
l’équipement et au rayonnement de ce lieu de pèlerinage national et régional. En
cela, vous étés demeurez conforme aux grands enseignement de l’évangile à
savoir, l’esprit d’humilité, l’amour du prochain, la consolation de la veuve et
de l’orphelin : l’attention aux plus démunis. Patriote convaincu, vous l’avez
été aussi Eminence. Beaucoup parmi nous se souvient de l’attitude permanente de
dialogue, de compréhension et de tolérance dont vous avez plusieurs fois faits
montre même à l’occasion des moments les plus difficiles de l’histoire de notre
chère patrie. Beaucoup se souviennent également de vos multiples interventions
discrètes, efficaces et toujours en faveur de notre pays et qui traduise votre
amour pour le Bénin et votre attachement au progrès de notre chère Nation. Avant
et après mon élection au fonction du président de
Des fidèles catholiques et autorités
prient pour le repos de son âme
Ils étaient des milliers de fidèles
de l’église catholique du Bénin à braver le soleil pour rendre un dernier
hommage au feu Cardinal Bernardin Gantin. Au cours de la messe d’inhumation dite
sur la pelouse du stade de l’amitié de Cotonou, le père célébrant, le légat du
Pape a dans son homélie retracé la vie exemplaire de l’illustre disparu. Il a
invité la communauté catholique du monde entier de même que toutes les autres
confessions religieuses à la prière afin que l’âme du Doyen du sacré collège à
Rome repose désormais en paix. Le Chef de l’Etat, le docteur Boni Yayi
accompagné de son épouse Chantal Yayi, les anciens présidents de
Une bénédiction pour les Béninois ?
Si la mort de Jésus Christ a une
signification à part entière, celle de Bernardin Cardinal Gantin est-elle une
bénédiction pour le peuple béninois ? En tout cas, nombreux sont les individus
membres de la communauté catholique qui pensent que la mort du premier cardinal
africain est une bénédiction pour notre pays. Pour eux, feu Bernardin Cardinal
Gantin n’a aucun défaut, même si l’être humain n’est jamais parfait. L’illustre
disparu a tellement de qualités que les Béninois ne lui ont pas trouvé de
défaut.
Une messe d’action de grâce dite en
son nom
Le cardinal Bernardin Gantin a eu
tous les hommages dignes de son rang de pasteur catholique. C’était mercredi
dernier après l’accueil de la dépouille mortelle à l’aéroport de Cotonou. Une
horde de fidèles chrétiens l’attendait à l’Eglise saint Michel où a été dite en
son honneur, une messe d’action de grâce. Cette messe a connu la participation
de nombreuses personnalités politico-religieuses. A leur tête, le premier
magistrat de notre pays, le Dr Thomas Boni Yayi. Au cours de la célébration de
l’eucharistie, le Cardinal Théodore Adrien Sarr n’a pas manqué de souligner les
qualités de l’homme. « Pour l’Eglise toute entière, la mort du Cardinal Gantin
est une grande perte et un grand deuil », dira-t-il. Premier évêque africain,
devenu un étroit collaborateur du Pape dans le gouvernement de l’église
universelle, le Cardinal Bernardin Gantin de son vivant, a accompli de
nombreuses actions qui resteront à jamais gravées dans l’histoire et dans les
mémoires de ses pairs. Ainsi, ils sont venus très nombreux, les fidèles
catholiques du Cameroun, du Togo, d’Amérique, de Paris et de Rome assister à
l’eucharistie qui a été dite en l’honneur du prélat ce mercredi à l’église
Saint-Michel de Cotonou. Toutes choses qui témoignent de l’affection que lui
portait la communauté catholique. Soulignons que pour ce qui concerne le
Cardinal Bernardin Gantin, une messe de funérailles pour le repos de son âme
sera dite ce vendredi 23 mai à
Cardinal Bernardin Gantin
inoubliable à `’Tindji Assanli’’
Tindji Assanli, petit village de la
commune de Zakpota dans le département du Zou. Tindji Assanli, comme la majorité
des villages du Bénin, est une agglomération regroupant quelques centaines
d’habitations faites en terre battue et couvertes de pailles. Seules
quelques-unes d’entres elles sont construites en brique et portent des feuilles
de tôles. C’est dans ce village entouré d’une forte végétation qui lui donne une
fraîcheur qu’est originaire le premier cardinal d’Afrique Bernardin Gantin. Ses
frères, amis, camarades de jeu d’antan se souviennent encore de l’homme et
s’accordent à dire que son décès est une perte pour le village. Selon les
explications des gens du village du Cardinal, le nom Gantin, dans son essence
signifie « Gantin ma dji ya » « adô ma hou gantin » ce qui veut dire qu’un
Gantin ne souffre pas, un Gantin n’a pas faim, un Gantin ne manque de rien.
Dans le village, tous ses amis
s’accordent à dire que depuis son enfance, Bernardin avait un comportement
exemplaire, il n’avait de problèmes avec personne. C’était un bon enfant. Pour
son neveu et unique maçon du village, le Cardinal a laissé de nombreux
souvenirs. Parmi ceux-ci, il se rappelle les temps forts de l’érection de
l’unique chapelle du village. Une action qui a tenu à cœur le Cardinal et à
laquelle il a activement participé. Pour d’autres cousins, neveux, petits-fils,
ce sont les conseils et les dons du Cardinal qui ont contribué pour beaucoup à
leur éducation qu’ils regrettent.
Pour l’histoire, le père du
Cardinal, Henri Gantin était lui-même un homme respectable et avait été cheminot
à l’Ocdn, actuel Ocbn à Bohicon. A la mort de celui-ci en 1936, Bernardin a été
accueilli par son petit oncle Prosper Pliya, le père de l’écrivain Jean Pliya.
Prosper était un agent comptable. Son rôle a été déterminant dans le
développement des membres de la famille.
Bernardin entre au séminaire la même
année où il perd son père et quatorze années plus tard, il est ordonné Prêtre.
De temps en temps, il allait à Athiémé en vacances chez son oncle où dans sa
maison paternelle à Tindji Assanli. Malgré ses nombreux voyages et occupations,
il a gardé les habitudes culturelles de son village. Lors de ses descentes chez
ses parents, il ne se gênait pas de partager ses repas avec ses parents et amis
et ceux-ci se plaisent à le dire. Tellement, il avait du mérite.
A Assanli, depuis la journée noire
du 13 mai où le baobab est tombé, la tristesse s’est installée dans le village
et les populations attristées se croisent, se saluent sans la chaleur des jours
d’avant le 13 mai.
Alors que certains regrettent le
cardinal pour ses bons conseils, son assistance, d’autres regrettent outre ses
bienfaits, les produits et denrées alimentaires que le Cardinal ramène et offre
gracieusement aux populations.
Le cardinal Gantin et le mois de
Mai, mois de Marie
Le mois de mai, mois de Marie a été
très significatif dans la vie du cardinal Bernardin Gantin. Né dans les bras de
Marie, mère de l’église, un 08 mai, il a vécu dans le respect des normes de
l’église. On se souvient encore, il y a 27 ans, un 13 mai, quand le pape Jean
Paul II avait été victime d’un attentat meurtrier. Après cet attentat, le Pape a
fait du cardinal Bernardin Gantin son légat. Durant toute sa vie, il a été
dévoué à la cause de Marie par sa participation à la réalisation de la grotte
mariale d’Arigbo de Dassa-Zoumé. Il est mort le 13 mai dernier dans le mois de
Marie et est enterré le 22 de ce même mois.
La sécurité a été de mise
Les éléments du général Lègba Kokou
Sèmègan, directeur général de la gendarmerie nationale, du contrôleur général de
police, Eugène Boya, directeur général de la police nationale et du Chef d’état
major général des armées, le général de division Mathieu Boni ont mis les petits
plats dans les grands pour assurer la sécurité de nos hôtes. Ces prouesses des
forces de l’ordre n’ont pas été sans la contribution des populations. De
l’aéroport international de Cotonou jusqu’à la ville historique de Ouidah où la
dépouille mortelle de feu Bernardin Cardinal Gantin repose en paix, les
populations ont respecté leurs injonctions. On peut donc dire que l’armée
béninoise dispose d’un savoir-faire ingénieux qui ne reste qu’à être accompagné
de moyens.
Testament du Cardinal Bernardin
Gantin lu par Mgr Paul Vieira, Evêque de Djougou
Mon testament ;
Écrit de ma main ce 22 juillet 1998
à Rome, cité du Vatican.
Un testament, c’est une chose
importante. Plus qu’un devoir final, il est le message d’ouverture à la dernière
messe, à la dernière célébration mystique de ses noces eucharistiques quand il
s’agit d’un homme revêtu du sacerdoce.
Comme prêtre, je dois donc
l’accomplir avec des sentiments de profondes actions de grâce, avec un coeur
contrit et humilié.
Comme prêtre, qu’ai-je pu avoir en
propre que je n’ai entièrement et gratuitement reçu.
C’est en effet par la grâce de Dieu
uniquement que je suis ce que je suis. Toute ma vie présente, restante et
éternelle, devra se passer à dire merci à Dieu trinité : Père, fils et
saint-esprit.
Je dédie ces mots du coeur, de la
foi et de la vie à Marie, mère de Jésus-Christ et notre mère dans le mois de qui
je suis née, 08 mai 1922.
Tout mon amour chrétien se résume en
ces simples mots : Dieu, Jésus-Christ, église, le Pape, la sainte vierge Marie,
réalités suprêmes que Rome m’a fait redécouvrir, aimer et servir. Pour cela
encore, comment jamais pouvoir remercier a suffisance le seigneur.
Mon cardinalat a été une fleur
gratuite que Paul VI a mise sur ma vie en juin 1977. Lorsque la providence m’a
associé, je ne sais pourquoi à des géants de la foi, de la culture et du service
ecclésial. A part un seul survivant, en ce jour comme moi, tous les autres
participants à ce consistoire, le dernier du Pape Montini ont déjà rejoint le
Seigneur en son éternité.
Devenu le doyen du prestigieux
collège des cardinaux en juin 1993 par l’élection de mes pairs dans l’ordre des
évêques, je suis bien conscient de mon indignité en face d’un si grand honneur.
A cause de cela,
Le Pape Jean-Paul II a été pour moi
un vrai père attentif et encourageant. Il m’a comblé au delà de tout et de tout
mérite. Les témoignages en sont infinis. Je le remercie très filialement. A lui,
je demande pardon pour mes insuffisances dans les services qu’il m’a confiés.
Pardon également, je demande à qui
j’aurais fait de la peine ou du tort.
Je demande, comme pauvre pécheur,
l’aumône de la prière de tous.
Prière, prière, prière. C’est tout
ce que je demande après ma mort. C’est ce dont on le plus besoin les chrétiens,
vivants ou morts. Quand ils ne sont plus de ce monde visible, ils en ont encore
plus besoin parce qu’ils ne peuvent plus rien pour eux-mêmes.
Je suis donc dès maintenant très
reconnaissant envers ce qui me ferait la charité de leur souvenirs priants.
Je compte beaucoup sur la solidarité
fraternelle qui est l’un des traits de notre église.
Église famille, église communion,
église fraternité des saints et ceux qui sont appelés à ce grand idéal de la
sainteté.
Prière, prière, prière avant tout et
uniquement prière, prière, prière, seulement. Merci !
Dormir avec mes frères du Séminaire
Saint-Gall de Ouidah est mon souhait ultime. La chapelle est une demande de
faveur.
Ma prière ultime au Dieu Trinité par
Marie c’est « Non confuda in éterno », ce qui signifie : « que je ne sois pas
couvert de honte pour toujours ».
Cardinal Bernardin Gantin
Signé le 20/05/1996
Authentifié au mois de novembre 2007
en présence de Mgr Paul Vieira, Evêque de Djougou.
Discours de la famille Gantin
Nous voici famille Gantin de
Zangnando et collectivité Migan Fagla de Tindji à Sali, privé, orphelin de notre
frère Bernardin cardinal Gantin, notre oncle et bel oncle, notre cousin et beau
cousin, bref notre patriarche que nous pleurons. Il a toujours été notre
porte-parole avec son style, son verbe, sa délicatesse et sa finesse dont il
avait le secret et le talent. Je demanderai votre indulgence pour ma prise de
parole devant vous qui êtes habitué à ses brillantes interventions. Le jeudi 1er
mai dernier à la suite du décès de Monseigneur Agboka, évêque émérite d’Abomey,
le cardinal s’est rendu de Cotonou à Zangnando dans le village natal de notre
père pour se reposer 48 heures avant les funérailles et se rapproché ainsi
d’Abomey où les obsèques étaient prévus pour le samedi 03 mai. De tels
déplacements, nous en avons fait au moins trois fois auparavant pour d’autres
circonstances sans aucun problème. L’avant dernier le 03 février pour la
consécration épiscopale du nouvel évêque d’Abomey. Mon frère tenait à accomplir
ce devoir de confraternité envers le deuxième évêque de notre pays que lui-même
avait consacré en 1963. En effet, pendant la maladie de Monseigneur Agboka, il
lui avait rendu plusieurs fois visite à l’hôpital malgré ses difficultés de plus
en plus grandes à marcher. Arrivé cette fois ci à Zangnando, les conditions de
chaleur humide rencontré et aggravé par un long déficit de fourniture d’énergie
électrique ont favorisé le déclenchement d’un syndrome de déshydratation aigue
avec de troubles de transit intestinal chez le cardinal. Nos efforts sur place
puis à Cotonou avec un collège de confrère de toute spécialités et enfin à
l’hôpital Georges Pompidou à Paris pour juguler cette crise n’ont pu hélas être
couronnés de succès.
Le 13 mai, en la fête de notre Dame
de Fatima, notre frère était rentré dans sa Pâques éternelle soit 27 ans jour
pour jour après l’attentat manqué sur la place Saint Pierre contre le Pape Jean
Paul II que vénérait le Cardinal Gantin. Tout est grâce. Un des proches du
Cardinal nous aide à lire en ces termes, le sens cet évènement. Ce n’est pas un
hasard, dit-il si celui qui veut mourir chez lui meurt malgré tout à étranger et
revient chez lui comme don de l’universel, que le don du seigneur soit béni. La
famille Gantin vient de perdre le plus illustre des siens. Mais qui est-il le
cardinal ? Né d’une famille modeste, il était le second d’une famille de six
enfants. Ma soeur et moi en sommes aujourd’hui les derniers représentants. A 13
ans, alors qu’il fréquentait l’école publique d’Abomey, il décida d’entrer au
séminaire. Pour l’annoncer à notre papa, chef de gare à Bohicon, il parcouru à
pied rappelons que nous sommes en 1935, les neuf km qui séparent ces deux
localités. Informé, notre papa lui demanda : Bernardin sais-tu que cette maison
dans laquelle tu aspires à entrer n’a pas de chemin de retour ? Il répondit sans
hésiter, oui Papa. Et poursuivant, notre papa lui demanda d’aller informer notre
maman à la maison. Ce qu’il fît mais à sa manière. En effet arrivé à la maison,
il prit son repas puis retourna à Abomey sans avoir rien annoncé à notre maman.
Notre Papa à son retour de travail s’inquiète de voir notre maman toute calme,
toute sereine. Intrigué, il posa la question as-tu vu Bernardin ? Oui, il est
venu, il a mangé et il est reparti. C’est alors que notre papa fut obligé
d’annoncer à notre mère, le motif de la visite de Bernardin. Celle-ci s’est
naturellement fondue en larme. Certainement en raison du futur éloignement de
son fils et des liens particuliers qui les unissaient. En effet, notre frère a
été celui qui a donné dans son enfance le plus de souci de santé à notre maman.
De cette anecdote, il ressort des traits de caractère marqué, de conviction, de
détermination mais aussi le souci de ménager la sensibilité de sa mère. A 37
ans, il devient le premier archevêque africain et en 1971, il est appelé à Rome.
Nous sommes très fier de lui, retenons de lui une grande leçon : « savoir
s’oublier et se donner aux autres ». Visionnaire, il nous laisse un grand
héritage spirituel que nous devrons nous efforcer de perpétuer. Il restait
malgré la distance très rattaché à sa terre natale, à sa famille et aux
Béninois. La joie de revoir sa mère, ses frères, confrères et amis lors de son
passage à Cotonou était manifeste. Chacun avait beaucoup de prix à ses yeux. Il
me demandait toujours de saluer de sa part ses anciens camarades de classe
primaire dès que j’en avais l’opportunité. Mieux encore, après son retour au
Bénin pour la retraite, j’ai eu à l’accompagner à sa demande dans divers
quartiers de Cotonou, à Sémè, à Porto-Novo etc. Pour voir plusieurs de ses amis
d’enfance. Sa grande ouverture d’esprit et sa qualité d’écoute indéniable lui
ont permis de rencontrer des hommes et des femmes de tout horizon, de toutes
confessions et de toutes conditions sociales qui sont devenus ses amis. C’est un
homme rigoureux, à cheval sur la ponctualité. Il ne laissait rien au hasard. Il
n’aimait pas improvisé. Il écriait toutes ses homélies, les retouchait jusqu’à
la dernière minute. En 1971, à son départ pour Rome, ses amis regrettaient de ne
plus le revoir mais en décembre 2002, il a été très heureux de pouvoir revenir
définitivement chez lui au Bénin. Il disait que : « je reviens au pays pour
vivre le reste de mon âge, pour prier, écouter et me reposer ». Prier beaucoup.
C’était un homme de prière. Ecouter beaucoup en sa qualité de Pasteur et de
confesseur, ce n’est pas étonnant. Il répondait à toutes les sollicitations
d’ici et d’ailleurs, fidèle à lui-même et ses convictions de tout faire pour
aider les autres. Je trouve bien son goût du travail bien fait. Se reposer pas
vraiment et sur ce point, il n’était pas homme à se laisser dicter des consignes
et puis la maladie arrive. Et en temps que médecin, j’ai été témoin de
l’acceptation pas lui de l’épreuve. Le 13 mais 2008 à 86 ans, le Seigneur l’a
rappelé. Aujourd’hui, il repose auprès de Dieu après avoir mené une vie tournée
vers les autres avec pour mission de développer la foi chrétienne. Il a su
poursuivre et amplifier de façon remarquable l’œuvre d’évangélisation initié
dans notre pays par les missionnaires. Mon admiration est immense pour mon frère
pour sa capacité à se donner avec une telle ferveur au service du Christ comme
l’illustre sa devise d’Evêque « In to sanctus servicio ».
Le cardinal Gantin était très
attaché aux droits et devoirs du citoyen, à la justice sociale ainsi qu’au
respect des institutions de l’Etat. Les anciens parmi nous se souviennent sans
doute de sa prise de position dans l’affaire Taïgla. De même, de son retour pour
la retraite au pays, il a écrit un bel article sur ce que représente le drapeau
national pour tout pays devant le spectacle désolant des drapeaux qu’on brûlent
dans les pays en conflit.
Le cardinal Gantin aimait
l’excellence. Il nous disait : « il ne s’agit pas pour nous de singulariser mais
plutôt de nous distinguer ». Il a gardé de ses élèves de classe de 6è et de 5è
au séminaire un attachement et une affection toute particulière. Il conservait
avec amour dans ses tiroirs, la photo jaunie de leur promotion et gardait
surtout le contact avec chacun d’eux. Le Père Alphonse Quenum, l’un des plus
doué de cette promotion a témoigné en des termes émouvants de ses liens
d’affection lors de la cérémonie d’hommage qui lui a été rendu à l’occasion de
ses 30 ans de cardinalat en 2007. Malgré sa santé fragile, il ne reculait jamais
devant le devoir que représentait pour lui l’amitié. Ses déplacements en Afrique
pendant sa retraite ont été multiples : Aléjo, Cara, Aného au Togo, Libreville
au Gabon, Abidjan en Côte d’Ivoire, Dakar au Sénégal etc. En Europe également,
au Vatican et en France, j’en aurais beaucoup à raconter mais le temps presse.
De ce parcours pastoral exemplaire riche d’action et de réflexion dont mon frère
a honoré notre famille, notre pays, notre continent et au-delà, l’église
universelle, que pourrions-nous retenir ? Tous, nous pouvons croire en l’avenir
à condition de cultiver notre talent, d’oeuvrer pour le bien commun d’être
déterminer, persévérant, ouvert, tolérant et de respecter l’amour du prochain.
Autant de qualités nécessaires qui faisaient l’homme qu’il était et qui
permettraient à chacun de nous et à notre pays de se distinguer dans le concert
des nations. Il ne nous reste plus maintenant qu’à nous unir dans la prière afin
que le Seigneur accueille son fidèle serviteur auprès de lui. Aujourd’hui comme
l’a écrit une amie de notre famille, il nous précède comme il l’a toujours fait.
Et c’est sûr, nous le reverrons. Et, il saura continuer à nous attirer toujours
un peu plus vers Dieu dès cette terre ensemble vers notre avenir commun de joie
et de paix en Dieu. Il avait le culte de la fidélité et de l’amitié. Parmi ses
nombreux amis de toutes catégories et conditions sociales confondues, il y
comptait bien des princes de l’église, des chefs d’Etat, des académiciens que de
simple gens. Il répondait lui-même à ses nombreux courriers. Et tous ses amis, à
l’annonce de sa mort se sont manifestés pour lui rendre un dernier hommage à
Paris. Plusieurs de ses amis sont venus s’inclinés devant sa dépouille mortelle
et présenter leur condoléances dont le président Chirac et sa femme Bernadette.
Ici, à Cotonou, d’autres se sont rendus dans sa chapelle privée à Akpakpa pour
prier. Merci à vous tous présents ici ou ailleurs qui le portez dans votre coeur
et manifestez de mille manières votre douleur, votre peine et votre chagrin.
Merci pour vos nombreux appels téléphoniques, courriers électroniques,
télégrammes, visites et dons. Je tiens particulièrement à présenter toute la
reconnaissance de la famille Gantin à vous le président Yayi Boni, pour votre
implication personnel et votre soutien avant et pendant la maladie de mon frère
et les présentes manifestations. Mes remerciements vont également à sa sainteté
le Pape Benoît XVI pour les condoléances à notre famille et la forte présence du
Saint siège pour la présente cérémonie. Merci également à toutes les délégations
des pays amis représentées ici en particulier les amis de mon frère venus des
Usa, de
Vous me permettrez au cours de mes
remerciements de mettre un accent particulier sur le soutien que j’ai reçu de la
part de l’Evêque de Pontoise et grand ami de cardinal pour sa grande
disponibilité et énergie déployée dans l’organisation des obsèques à Paris. Les
petites sœurs des pauvres à Paris qui n’ont pas été du reste au cours de ses 48
heures de chapelle en leur domicile, du personnel soignant de l’hôpital Georges
Pompidou. Merci de tout coeur à la conférence des évêques de Cotonou, aux
différentes congrégations du Bénin. Permettez moi de mentionner ici les amis de
mon frères, ceux que j’ai toujours rencontré en sa compagnie au cours de sa
retraite, je veux nommer, le président Emile Derlin Zinsou, son ami de vielle
date, monsieur Emile Paraïso, le Président Tévoèdjré Albert et parmi ses amis
d’Akpakpa, le ministre Stanislas Pognon et son épouse qui ont veillé à la
salubrité et à l’embellissement de sa maison etc... La liste de mon frère est
particulièrement longue et je vous prie de ne pas les mentionner tous, faute de
temps.
Certains peuvent regretter que ce
grand homme ne nous a pas laissé de publication pour favoriser une grande
diffusion de son héritage comme le font remarquer nombreux de ceux qui sont ici
et à travers le monde qui se sont appropriés des leçons de sa vie. Il laisse une
matière abondante qui ne demande qu’à être éditée. Si nous mettons bout à bout
toutes les correspondances qu’il a écrites à beaucoup et de ses manuscrits,
l’héritage spirituel est là. Si nous mettons de bout en bout toutes ses
homélies, toutes ses paroles adressées à chacun et à tous dans d’innombrables
circonstances, l’héritage spirituel est toujours là. L’enseignement est riche et
abondant. Qu’une telle richesse d’écriture n’ait jamais été l’objet de
publication est encore le signe de celui qui n’a jamais été habité par le soucis
de laisser un homme. La seule chose qu’il ait demandée au Seigneur, la seule
chose qu’il ait cherché, c’est la volonté du Seigneur qui l’a choisie pour aller
enseigner toutes les nations, les baptisant au nom du père, du fils et du Saint
esprit.
Emile Derlin Zinsou/ ancien
président du Bénin
« C’est un homme très proche de moi
et un ancien ami. Pour moi, en dehors du deuil national, tous les Béninois se
sentent un peu atteints par ce deuil. C’est un deuil personnel. On peut tout
retenir de cet homme. Il est un grand homme dans tous les domaines, spirituel,
culturel... Il a pratiqué la charité chrétienne de façon merveilleuse. J’ai
appris son décès par téléphone depuis Paris puisque je suivais sa santé de près.
Je l’ai accompagné jusqu’à l’aéroport quand on l’évacuait ».
Eric Houndété/ député à l’Assemblée
nationale
« Je l’ai vu à l’oeuvre. Je l’ai vu
en tant qu’homme d’église. Je l’ai vu pratiquement en tant qu’ambassadeur du
Bénin parce que bon nombres de mes situations m’ont amené à solliciter ses
services quand il était à Rome. C’est une grosse perte d’abord pour l’église, et
aussi pour le Bénin tout entier. Je suis un peu dans la douleur ».
Guillaume Attigbé/ syndicaliste
« Je ne sais pas ce qui arrive à
notre pays. Nous sommes encore en train de pleurer la mort de Mgr Lucien Agboka,
il y a deux semaines quand maintenant, c’est le cardinal Gantin qui nous quitte.
Il est un grand homme. Des hommes comme lui sont de plus en plus rares dans
notre pays. Il sait quand il faut intervenir, comment parler aux gens, comment
considérer les positions, les approcher. Quand il intervient dans une situation,
on met toujours de l’eau dans son vin et on repart parce que c’est un grand
responsable moral. Que la terre lui soit légère ».
Nicéphore D. Soglo/ maire de Cotonou
« C’est un sentiment de profonde
tristesse pour quelqu’un de cette dimension exceptionnelle et historique, qui
vient de nous quitter. Le cardinal Gantin aurait pu être le premier Pape noir.
Pour le pays, il était le symbole de notre dignité pour toute l’Afrique. J’ai eu
la chance de l’avoir dans les moments de joie et également de souffrance. C’est
un confident, un ami, un bon conseiller. Dans les moments exceptionnels de la
vie de cette nation, il était toujours là. C’est une perte d’un parent, d’un
frère. Nous sommes croyants et de là où il est, il va continuer à nous guider.
C’est le sentiment de tout le peuple africain, notamment du Bénin ».
Robert Dossou/ avocat à la cour
« Le cardinal Gantin est pour moi un
rêve inachevé. Ensuite, c’est une gigantesque et inépuisable source d’humilité.
A travers lui, j’ai rêvé de voir le premier pape africain de l’époque moderne ».
Abraham Zinzindohoué
« Le premier souvenir date de 1945 à
la consécration de Mgr Lucien Agboka. Il y avait une marche impériale depuis le
calvaire jusqu’à la mission catholique d’Abomey. Nous avons beaucoup voyagé
ensemble. Vers la fin de son séjour à Rome, je lui ai fait avec ma famille une
visite. Nous allons le voir dans son domicile et il en était très heureux. C’est
un grand prélat, grand patriote, grand homme. Pour ma désignation à Ouagadougou,
il m’a dit qu’il a un double sentiment : un sentiment de joie quand il y a
promotion mais aussi de regret parce que toute séparation amène un sentiment de
regret. J’ai aujourd’hui pour lui un double sentiment en tant que chrétien ».
Roger Gbêgnonvi/ ministre
alphabétisation
« J’aurais préféré que cela se passe
chez nous. Mais nous avons le droit et le devoir d’entretenir jusqu’au bout
l’espoir de le conserver vivant à 90 ou 95 ans. Nous ne l’avons pas pu puisqu’il
est parti. Je ne vois pas aujourd’hui ni en politique ni dans le clergé
quelqu’un qui puisse prendre sa succession parce qu’il ne s’agit ni de l’église
ni du clergé. Le Bénin a besoin constamment de quelqu’un qui l’amène à voir plus
loin, à monter plus haut. Nous avons besoin d’une telle étoile pour la direction
vers le haut ».
Fraternite-info.com
http://www.fraternite-info.com/article.php3?id_article=1192
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Gantin
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