Mutinerie de militaires en côte d'Ivoire ou remake du coup d'Etat de 1999 ?
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Côte d'Ivoire: les mutins marchent sur Yamoussoukro (22septembre 2002)
La Côte d'Ivoire coupée en deux : Abidjan contrôlé par le pouvoir central, et le nord (Bouaké, Korhogo) par les rebelles (21 sept 2002)
Deux villes encore aux mains des insurgés ivoiriens (21 septembre 2002
Au moins 80 loyalistes tués en Côte d'Ivoire, selon une source militaire (19 septembre 2002)
Robert Guéï tué dans une tentative de putsch où périssent des dizaines de personnes (19 septembre 2002)
Le ministre de l'Intérieur tué dans les combats en Côte d'Ivoire
ABIDJAN (Reuters), 19 septembre 2002, 17h14 - Le ministre ivoirien de l'Intérieur, Emile Boga Doudou, a péri dans les affrontements de jeudi à Abidjan, a déclaré un haut responsable ivoirien, qui confirmé par ailleurs la mort de l'ancien chef de la junte Robert Guéï.
"Je peux confirmer la mort de ces deux hommes. Boga vient de mourir de ses blessures", a déclaré ce haut responsable du gouvernement du président Laurent Gbagbo.
De source militaire, on parle d'au moins 20 soldats et
civils tués dans les combats, qui ont éclaté entre mutins et troupes régulières vers
04h00 locales à Abidjan, à Bouaké (deuxième ville du pays) et à Korhogo.
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La Côte d'Ivoire secouée par un soulèvement militaire
ABIDJAN (AFP), jeudi 19 septembre 2002, 16h38 - La Côte d'Ivoire était secouée jeudi par un soulèvement militaire au cours duquel le général Robert Gueï, accusé par le gouvernement d'être à l'origine des troubles, et le ministre de l'Intérieur, Emile Boga Doudou, ont été tués à Abidjan, alors que les mutins ont pris le "contrôle total" de la seconde ville du pays, Bouaké (centre).
A Abidjan, de violents combats ont fait au moins dix morts et plusieurs dizaines de blessés jeudi matin dans les rangs des forces loyalistes, selon un premier bilan provisoire de source militaire. Plusieurs "assaillants" ont également été tués, selon la même source.
Dès le début de la journée, alors que des tirs d'armes lourdes étaient entendus dans la capitale économique ivoirienne, le régime du président Laurent Gbagbo avait désigné le général Gueï, auteur d'un coup d'Etat en 1999, comme l'instigateur de cette nouvelle mutinerie. "On a identifié qui est à l'origine des troubles. C'est le général Gueï", avait déclaré à la presse Alain Toussaint, conseiller en communication du président, qui se trouve en voyage officiel en Italie.
Selon le ministre ivoirien de la Défense, Moïse Lida Kouassi, le cadavre du général a été retrouvé dans une rue près d'un des grands hôpitaux d'Abidjan. Le ministre de l'Intérieur a lui été tué au début de la mutinerie.
A Bouaké, les mutins ont pris "le contrôle total" de la ville, selon un responsable politique joint par téléphone depuis Paris. Deux officiers et le commandant militaire de la région ont été tués et deux responsables politiques enlevés, dont le ministre des Sports, François Amichia, selon une source militaire.
Selon l'un des mutins, interrogé par téléphone par l'AFP à Abidjan, "personne ne sort (à Bouaké), personne ne travaille". Les mutins tenaient notamment la base aérienne de la ville.
A Abidjan, les tirs ont commencé vers 03H00 GMT (et locales). "On estime à cinq ou six cents le nombres des assaillants qui ont attaqué en plusieurs vagues. Ils étaient équipés de fusils d'assaut AK-47, de mitrailleuses lourdes T-38 et d'armes anti-char", a indiqué une source militaire.
Autour du camp de gendarmerie d'Agban, attaqué dans la matinée, des journalistes de l'AFP ont dénombré huit cadavres d'hommes présentés par les gendarmes présents comme des assaillants.
Les gendarmes ont repris le contrôle du camp, un des principaux casernements de la capitale économique ivoirienne, mais tiraient sur tous les hommes et véhicules suspects. Autour du camp, les officiers avaient du mal à calmer leurs hommes, très hargneux et tendus, et les tirs partaient régulièrement, sans ordre ni véritable contrôle.
La femme du ministre de la Défense a également été enlevée par des assaillants après l'attaque de son domicile dans la nuit. Le ministre de la Défense avait indiqué plus tôt qu'"il y a des indices que nous faisons face à une tentative de coup d'Etat".
Les soldats français stationnés en Côte d'Ivoire n'ont pas été sollicités et n'ont mené aucune action particulière jeudi, a affirmé à Paris le porte-parole du ministère de la Défense, Jean-François Bureau. "Le contingent de quelque 600 militaires français stationné en Côte d'Ivoire n'a pas été sollicité et n'a pas eu à agir d'une façon ou d'une autre", a déclaré à la presse M. Bureau.
La France suit toutefois "avec attention" la situation en Côte d'Ivoire, a annoncé de son côté le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, François Rivasseau. "Notre ambassade est naturellement mobilisée. Elle a notamment demandé aux ressortissants français de rester à leur domicile aujourd'hui, de ne pas conduire leurs enfants à l'école (les établissements scolaires français sont fermés) et d'éviter tous les déplacements non indispensables, a-t-il ajouté dans un point de presse.
ABIDJAN (AP), jeudi 19 septembre 2002, 16h33 - L'ancien chef de la junte militaire ivoirienne, le général Robert Gueï, est mort jeudi lors du soulèvement impliquant apparemment des militaires en Côte d'Ivoire, ont annoncé des officiers de l'armée et la police ivoiriennes.
Selon le sergent Ahossi Aimé, des gendarmes loyalistes ont tiré sur le véhicule de l'ancien chef de la junte quand son chauffeur a refusé de s'arrêter à un barrage routier dans le centre d'Abidjan. Le général Gueï, dont on ignorait s'il avait joué un rôle dans les événements survenus en Côte d'Ivoire depuis le début de la matinée, est mort sur place, a-t-il précisé.
Des policiers et des officiers de l'armée ont également rapporté le décès du général Gueï qui n'avait pas encore reçu de confirmation officielle.
Des tirs et explosions ont éclaté dans la matinée à Abidjan et dans plusieurs autres villes de la Côte d'Ivoire, en proie à des violences ethniques et politiques depuis le coup d'Etat de 1999. Au moins huit personnes sont mortes dans les premières heures de combat de ce soulèvement impliquant manifestement les forces de sécurité et qui survient alors que le président Laurent Gbagbo se trouve à l'étranger, en Italie.
Le général Gueï avait pris la tête du pays à la faveur de ce premier coup d'Etat perpétré en Côte d'Ivoire. Après s'être autoproclamé vainqueur du scrutin présidentiel en octobre 2000, il avait dû quitter le pouvoir sous la pression de la rue.
Mutinerie aux allures de coup d'Etat en Côte d'Ivoire
ABIDJAN (AFP) , jeudi 19 septembre 2002, 14h07 - Une mutinerie de militaires a éclaté jeudi à l'aube en Côte d'Ivoire et particulièrement à Abidjan, où les combats ont fait au moins dix morts et plusieurs dizaines de blessés parmi les forces loyalistes.
"Il y a des indices que nous faisons face à une tentative de coup d'Etat", a déclaré à Abidjan le ministre ivoirien de la Défense, Moïse Lida Kouassi. Selon le ministre, qui s'est entretenu tôt jeudi matin avec le président Gbagbo actuellement en visite à Rome, la mutinerie a été lancée par "environ 280 soldats qui devaient être démobilisés en décembre. Certains se sont soulevés, en s'appuyant sur les ordres du général Gueï".
Auteur du coup d'Etat de Noël 1999, le général Robert Gueï avait dirigé le pays jusqu'à l'élection présidentielle d'octobre 2000, à laquelle il s'était présenté mais avait été battu par Laurent Gbagbo.
Le général Gueï serait réfugié dans la cathédrale d'Abidjan, selon Alain Toussaint, conseiller en communication du président.
"Pour l'instant, nous nous en tenons à la thèse de la tentative de mutinerie de la part d'éléments qui allaient être démobilisés, mais effectivement il y a des indices que nous entendons vérifier et confirmer", a cependant déclaré le ministre de la Défense M. Kouassi.
Selon un soldat se présentant comme un mutin, un groupe de soldats qui devaient être prochainement démobilisés s'est soulevé. Ce soldat se présentant comme "Koné Daouda, soldat de 1ère classe, de la classe 98 2A", a indiqué que c'est un groupe de 750 militaires stationnés à Abidjan et Bouaké, à environ 400 km au nord d'Abidjan qui se sont mutinés.
"Le ministère de la Défense veut nous renvoyer à la vie civile. Cela fait deux ans qu'on est dans l'armée. On n'est pas d'accord. Pour se faire entendre on n'a que nos armes. On ira jusqu'au bout", a-t-il ajouté, refusant de préciser d'où il appelait.
A Abidjan, les combats ont fait au moins dix morts et plusieurs dizaines de blessés parmi les forces loyalistes, a indiqué une source militaire ivoirienne. Plusieurs "assaillants" ont également été tués, selon la même source. L'école de gendarmerie et le camp de gendarmerie d'Agban, à Abidjan, ont été repris dans la matinée par les forces loyalistes, selon le ministre de la Défense.
En province, le commandant militaire de la région de Bouaké (centre), le lieutenant-colonel Dagrou Loula, a été tué par des mutins, qui ont pris le contrôle de la préfecture et de la base aérienne de la ville, selon la même source. Selon lui, aucun avion n'est opérationnel sur cette base.
Selon un haut responsable du ministère de la Défense, le gouvernement avait été informé dès mercredi de la préparation d'une attaque.
Un coup d'Etat militaire, le premier de l'histoire de cette ancienne colonie française, avait eu lieu en Côte d'Ivoire en décembre 1999, premier producteur mondial de cacao et pays jusque là réputé pour sa stabilité.
A la suite de ce qui avait commencé comme une simple mutinerie pour des raisons financières, le général Gueï avait renversé le président Henri Konan Bédié. Après une transition militaire de moins d'un an, une élection présidentielle avait été remportée par M. Gbagbo.
Des soldats se mutinent mais pas de putsch en Côte d'Ivoire
ABIDJAN (Reuters), 19 septembre 2002, 13h09 - Des tirs nourris ont retenti avant l'aube à Abidjan, la capitale économique de Côte d'Ivoire, mais il s'agit selon les autorités d'une mutinerie et non d'une tentative de coup d'Etat.
Un haut responsable ivoirien a déclaré penser que des soldats fidèles à l'ancien chef de junte Robert Guéi étaient à l'origine de cette mutinerie.
Des tirs d'armes automatiques ont été entendus à partir de 04h00 locales (06h00 à Paris) dans plusieurs villes du pays, déclare à Paris le ministère français des Affaires étrangères sur son site Internet. Il cite, outre Abidjan, Kohrogo et Bouaké. Un haut responsable ivoirien a précisé que ces coups de feu avaient éclaté aux abords de casernes dans ces villes.
Un chauffeur de taxi aurait été tué près de la résidence du président Laurent Gbagbo, actuellement absent du pays, et le domicile du ministre de l'Intérieur aurait été pour sa part fortement endommagé par une explosion, ont déclaré des diplomates.
Le Premier ministre Affi N'Guessan a déclaré qu'un groupe de soldats protestant contre sa démobilisation était à l'origine des coups de feu mais que tous les points stratégiques du pays étaient contrôlés par l'armée régulière.
"Ces militaires demandent leur réintégration dans l'armée. L'effectif du contingent est de 750", a déclaré le chef du gouvernement à Reuters.
A Rome, où Laurent Gbagbo effectue une visite, les conseillers du chef de l'Etat ont également dit que le gouvernement contrôlait la situation.
"Nous avons eu vent de ces problèmes, nous avons le contrôle de la situation. Ce n'est rien. Nous ne considérons pas cela comme une tentative de coup d'Etat. Une tentative de coup d'Etat, c'est quand quelqu'un se déclare nouveau chef", a dit l'un d'eux joint au téléphone à l'hôtel abritant la délégation ivoirienne.
Le porte-parole de l'ambassade de Côte d'Ivoire à Rome, Richard Gbaka Zady, a fait savoir qu'aucun changement n'était prévu au programme de Laurent Gbabgo.
Le ministre des Affaires étrangères de l'ancienne puissance coloniale française, Dominique de Villepin, a toutefois déclaré lui aussi que les événements semblaient liés "à une mutinerie de militaires en voie de démobilisation".
"La France suit la situation. Nous prenons toutes les dispositions pour faire en sorte que tous nos ressortissants soient évidemment protégés dans les circonstances actuelles", a ajouté le chef de la diplomatie française à Europe 1.
Plusieurs centaines de soldats français restent basés à Abidjan mais ils ne sont pas intervenus lors du coup d'Etat de 1999 qui a mis fin à la réputation de stabilité du premier producteur mondial de cacao au sein d'une région troublée.
RUES DESERTES
A Abidjan, le crépitement d'armes légères ainsi que, par moments, le bruit d'armes plus lourdes, a été entendu avant l'aube dans plusieurs quartiers.
Par endroits, des hommes en uniforme militaire ont été vus tirant en l'air, à bord de Jeeps dont les plaques d'immatriculation ont été recouvertes de scotch. D'autres soldats ont réquisitionné des taxis, sans que l'on sache à quel camp ils appartiennent.
"Certains assaillants sont habillés en civil, nous ne savons pas qui ils sont", a confié un officier de la gendarmerie.
Une bande de mutins a fait irruption dans l'immense Hôtel Ivoire, ordonnant aux clients de lui donner les clés de leurs voitures et leurs téléphones portables. "Ils ont tiré en l'air et n'ont blessé personne", a déclaré un réceptionniste.
Les rues d'Abidjan étaient quasiment désertes au petit matin, à une heure habituellement chargée de la journée.
"C'est complètement désert et personne ne sort", a déclaré le journaliste Mohammed Fofana depuis un faubourg de la ville.
L'ambassade de France, indique à Paris le ministère des Affaires étrangères sur son site Internet, a recommandé à tous les ressortissants français de rester chez eux. Les écoles françaises, elles, ont été fermées. Le ministère déconseille en outre, "à ce stade", aux voyageurs de se rendre en Côte d'Ivoire.
Selon des habitants, les premières fusillades ont été signalées près de la caserne de la gendarmerie d'Agban.
La gendarmerie a joué un rôle essentiel pour porter au pouvoir l'actuel président Laurent Gbagbo à la fin 2000 alors que la junte militaire du général Guei, aux commandes du pays depuis le putsch de 1999, tentait de lui contester sa victoire aux élections.
Le scrutin avait été suivi de violentes manifestations de rue pour soutenir Gbagbo contre les militaires.
La Côte d'Ivoire a retrouvé un certain équilibre politique ces derniers mois, conforté par la décision de Laurent Gbagbo d'inclure des représentants du principal parti d'opposition de l'ancien Premier ministre Alassane Ouattara dans son gouvernement en août.
Ouattara est originaire du Nord majoritairement musulman tandis que Gbagbo vient du Sud chrétien.
Le parti de Robert Guéi - l'Union pour la démocratie et la paix - a été le grand perdant du remaniement ministériel.
Vendredi, l'ancien leader de la junte a annoncé qu'il retirait son soutien au gouvernement, l'accusant notamment de favoriser la division et l'insécurité et de procéder à des arrestations arbitraires.
Ces troubles ont eu pour conséquence de pousser à un plus haut de 16 ans le marché à terme londonien du cacao, qui fait référence en la matière. Le contrat LIFFE mars a ouvert au-dessus de la barre des 1.500 livres la tonne, atteignant les 1.505 livres (2.337 dollars). De source industrielle en Côte d'Ivoire, on explique que les exportations ne devraient pas être sérieusement affectées par cette hausse.
Matthew Tostevin (Reuters)